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Contrairement à une maladie, la musique se transmet par l’ouïe. Comprendre, il ne suffit pas d’être avec une personne qui aime un morceau pour se mettre à l’écouter. Mais un titre joué dans un supermarché ou dans une story Instagram peut facilement inciter l’auditeur à aller y prêter une oreille. C’est ce que prouve cette nouvelle étude, établie par des chercheurs canadiens et américains. En se basant sur les habitudes musicales des Anglais sur une période de sept ans, ils ont pu déterminer la contagiosité de certains morceaux et le verdict est sans appel : certains genres sont bien plus viraux que la plupart des maladies existantes. Gasto et électro, même combat ?
Cette étude a été publiée sur le site The Royal Society. Long de 16 pages, elle regroupe toutes les informations que ses quatre auteurs ont découvert en faisant leurs recherches. La première à s’être interrogée sur les liens entre la propagation d’un virus et de la musique est Dora Rosati, diplômée en statistiques et en mathématiques à l'université McMaster. Dans son enquête, elle explique son raisonnement : “Un grand nombre des processus sociaux qui conduisent à la propagation des virus, ou des analogues de ces processus, pourrait conduire à la propagation des chansons. Plus précisément, cette étude soutient l'idée que la musique et les maladies infectieuses dépendent toutes deux des liens sociaux pour se propager dans les populations.”
Authors model song popularity as a contagious process in #ProcA https://t.co/VAxQGmUdM7 | #infectiousdisease #musicdownloads #epidemiology #mathematicalmodelling @McMasterU pic.twitter.com/ooUy4GymYa
— Royal Society Publishing (@RSocPublishing) September 28, 2021
Pour effectuer ces recherches, pas besoin d’aller chercher des personnes malades, il suffit de regarder les classements de streaming en Grande-Bretagne. Pour cela, les chercheurs ont analysé tous les morceaux du top 1000 de MixRadio entre 2007 et 2014. Cette enquête prouve que les hits se développent vraiment de la même manière qu’un virus : une chanson arrive sur les plateformes, elle se propage à toute vitesse chez les utilisateurs pendant une certaine période, puis elle est de moins en moins écoutée. Même si chacun possède des goûts musicaux qui lui sont propres, selon Dora Rosati, il est possible de prédire quand un morceau va devenir un tube et quand il ne le sera plus.
Pour mener à bien cette étude, ces mathématiciens ont comparé le R0 (c’est-à-dire le taux de reproduction d’une maladie) à différents types de musique. Par exemple, le R0 du covid-19 tourne autour de 1 personne contaminée par personne infectée. Mais quand on parle de hip-hop, le R0 atteint les 310, un chiffre jamais atteint par un virus. Le genre musical le plus contagieux n’est autre que l’electronica, la seule musique électro pas pensée pour faire danser. D’après le Royal Society, son R0 serait de 3430, un nombre impressionnant pour un style qui ne touche qu’une petite partie de l’auditoire global des plateformes de streaming.
“C'est quelque chose de tout à fait logique, quand on considère que le bouche à oreille est quelque chose qui, un peu comme la maladie, va se transmettre via d'autres personnes. La principale différence est que la musique a plus de moyens de se propager”, détaille l’étude menée par Rosati. La mathématicienne espère que ses recherches serviront à anticiper la popularité de certains morceaux dans le futur. Un souhait qui semble compliqué à atteindre, même si ses résultats théoriques semblent sans appel.