2017 M04 24
Derrière son look décontracté et son évident franc-parler, Manu Barron est de ces hommes que l’on pourrait définir par ce qu’ils n’aiment pas. Le buzz ? « Je travaille à l’antithèse de ça. » Le management ? « Je me vois plus comme un producteur, dans le sens où j’ai une équipe avec laquelle on essaye de construire un projet. Pareil avec les groupes, on est plus dans une relation d’associés. » Le réseautage ? « Il s’en tape tellement. Avant de préciser : « Tous les vendredis soirs, je pars à la campagne avec mes potes et ma famille pour boire de la soupe et du vin tout le week-end. Quand je suis à Miami, Tokyo ou Los Angeles, je n’ai qu’une envie : rentrer pour cueillir les champignons. »
Discret et sans complexe. Le Français, qui se dit discret et du genre à se faire refouler de ses propres boites de nuit, aurait pourtant toutes les raisons de hausser les épaules au sein de l’industrie du disque. Depuis le début des années 1990, Manu Barron s’est en effet forgé un CV apte à affoler les « wikipedistas » : programmateur de l’Aéronef à Lille, fondateur de divers lieux culturels (La Condition Publique à Roubaix, le Social Club à Paris), découvreur de talents (Brodinski, Para One, Gesaffelstein lui disent merci), véritable entrepreneur (il fait partie de ceux qui ont donné un second souffle au Showcase en 2014), Manu Barron est également derrière la création du Silencio et de Savoir-Faire, qui, depuis 2008, s’est imposée comme l’une des plus fascinantes entités de management artistique en France.
« Avec The Blaze, tout est parti d’un mail comme j’en reçois des tonnes toutes les semaines.«
The Blaze, la dernière pépite. En clair, le mec est partout. Même s’il s’en défend : « J’ai l’impression d’être un artisan et de ne pas faire partie d’une industrie. C’est un mensonge, bien sûr, mais j’ai besoin de croire que je fais encore du sur-mesure. » Pour se justifier, il dit ainsi n’avoir aucun plan de carrière, avancer constamment sur la brèche et cite sa dernière trouvaille, The Blaze.
« À la base, tout part d’un mail comme j’en reçois des tonnes toutes les semaines. Jonathan, l’un des deux mecs du groupe, me dit qu’il aime Savoir-Faire et qu’il aimerait bien réaliser des clips. J’entre en contact avec lui et me rends compte qu’il a un projet avec son cousin sur lequel ils ont déjà bien avancé. À l’époque, ils n’ont que trois clips et trois morceaux, mais je tombe amoureux de Virile. Pendant quelques temps, j’ai essayé de trouver toutes les raisons pour ne pas travailler avec eux, comme je fais à chaque fois, mais j’ai décidé d’y aller et d’avancer avec eux. »
Jamais parti, toujours de retour. Depuis plus d’un an et demi, Manu Barron bosse ainsi sur un projet qui, à l’entendre, n’aurait pu être signé par aucun autre label. Parce qu’il y croît, parce que Jonathan et Guillaume lui font confiance, mais aussi parce qu’il n’a jamais voulu enfermer Savoir-Faire dans une esthétique prédéfinie. De Darius à Brodinski, de The Bewitched Hands à Myth Syzer et Ikaz Boi, sans doute parmi les deux meilleurs beatmakers français actuellement, l’entreprise parisienne a toujours tenté d’évoluer loin des formules éculées. « On n’a jamais signé de doublon, affirme en fin d’interview Manu Barron. On n’a pas un deuxième Brodinski ou un second Para One au sein de Savoir-Faire. L’idée, ce n’est pas de créer un produit à vendre clés en main, mais de bosser sur du faire ensemble, de créer une histoire commune. » Celle avec The Blaze, en tout cas, a toutes les chances de s’inscrire dans le temps.