César 2023 : les 10 meilleurs moments musicaux de la filmo de David Fincher

Récompensé vendredi dernier par un César d'honneur remis par Brad Pitt en invité surprise, le cinéaste américain a forgé l'une des plus belles filmographies des 30 dernières années. Celui qui a commencé sa carrière comme réalisateur de clips musicaux est connu pour la minutie avec laquelle il prépare et tourne chaque plan, mais le soin qu'il apporte à ses bandes originales est tout aussi remarquable. La preuve en dix exemples qui donnent envie de faire un marathon David Fincher.
  • 10. Nine Inch Nails – Closer (Se7en, 1995)

    Se7en est le genre de film qu'il suffit de voir une fois pour s'en souvenir toute sa vie. Dès le générique signé Kyle Cooper – l'un des plus célèbres de l'histoire du cinéma –, Se7en nous happe avec ce montage filmant la préparation des actes du tueur du film, qui n'apparaît plus ensuite avant les dernières minutes.

    Et pour accompagner cette plongée dans la noirceur de la psyché de John Doe, David Fincher choisit un remix strident d'un morceau de rock industriel de Nine Inch Nails, Closer, remixé par Coil et Danny Hyde, et qui s'achève par une phrase glaçante au regard du film qui suit : 'You get me closer to God'. Le début d'une longue collaboration entre Trent Reznor et David Fincher.

    9. Jefferson Airplane – White Rabbit (The Game, 1997)

    Le troisième film de David Fincher est l'un des plus injustement négligés de sa carrière. Pourtant, il suffit de (re)voir cette scène pour se souvenir que le cinéaste n'a réalisé aucun mauvais long-métrage.

    Arme à la main, le héros joué par Michael Douglas arpente son immense demeure plongée dans l'obscurité, avant qu'une violente lumière bleutée ne révèle les murs tagués, au son diégétique du classique psychédélique de Jefferson Airplane, qui résonne plus ou moins fort selon les pièces de la maison.

    Au moment où la voix de Grace Slick atteint son climax, Michael Douglas prononce un 'You fuckers' du plus bel effet avant de quitter cette scène cauchemardesque. Mais le morceau fait son retour dans le générique, et on ne s'en plaint pas : il a rarement été aussi bien utilisé au cinéma.

    8. Enya – Orinoco Flow (Millénium : Les Hommes qui n'aimaient pas les femmes, 2011)

    Avant de voir l'adaptation par David Fincher du roman à succès de Stieg Larsson, ce morceau d'Enya nous évoquait des ascenseurs ou des centres commerciaux. Le choc fut donc grand de l'entendre dans l'une des scènes les plus malsaines de ce film (qui n'en manque pourtant pas).

    Prisonnier du terrifiant psychopathe joué par Stellan Skarsgård, le pauvre journaliste Mikael Blomkvist (Daniel Craig) est en train de se faire torturer dans un sous-sol secret au son d'une musique apaisante censée couvrir ses cris.

    Cette musique, c'est donc Orinoco Flow et son fameux refrain 'Sail away, sail away', un choix improbable qui contraste bien sûr totalement avec la violence d'un serial killer. Et selon David Fincher, c'est Daniel Craig qui a proposé ce morceau qui figurait sur son iPod au moment du tournage. Quel homme.

    7. Donovan – Hurdy Gurdy Man (Zodiac, 2007)

    Chef-d'œuvre exigeant de plus de 2h30, Zodiac est sans doute le film de David Fincher dont la bande-originale est la plus pop, ce qui colle parfaitement à l'époque reconstituée par le long-métrage : le San Francisco des années 1960 et 1970.

    Le film regorge donc de grands moments musicaux, mais aucun ne dépasse la scène d'ouverture, où un jeune couple californien s'arrête en voiture dans un coin isolé pour avoir un peu d'intimité.

    L'autoradio commence à passer Hurdy Gurdy Man, la gentille pépite psychedelic pop de Donovan, avant qu'une Ford Mustang menaçante ne se gare derrière eux. Le tueur du zodiaque en descend et flingue le couple à bout portant, dans une scène de meurtre inoubliable superbement filmée en slow-motion et avec le volume du morceau poussé au maximum pendant les coups de feu.

    La fin de l'innocence de la fin des années 1960 n'a jamais été aussi bien illustrée qu'avec ce contraste archi-violent entre la musique et l'image, et Hurdy Gurdy Man fait une deuxième apparition dans le générique de fin.

    6. Trent Reznor & Atticus Ross – In The Hall Of The Mountain King (The Social Network, 2010)

    Première collaboration du duo avec David Fincher, The Social Network a offert à Trent Reznor et Atticus Ross un Oscar bien mérité, tant cette bande-originale pourrait occuper presque à elle seule tout ce top 10.

    Leur seule reprise est une version épique du In the Hall of the Mountain King d'Edvard Grieg, utilisée dans une scène filmée au ralenti et qui n'utilise aucun autre son, où les riches jumeaux Winklevoss victimes du créateur de Facebook participent à une course d'aviron aristo (la régate royale de Henley).

    Sous les yeux de la haute société britannique, les deux frères mettent toute leur rage dans cet affrontement qui semble mettre en jeu leur masculinité déjà fragilisée par Mark Zuckerberg, mais finissent évidemment par perdre, alors que le rythme du morceau s'accélère de plus en plus pour accompagner le sprint final. Il faut s'appeler David Fincher pour rendre l'aviron si excitant.

    5. Jean-Sébastien Bach – Air (Se7en, 1995)

    La définition d'une scène culte. Le vieux détective intello joué par Morgan Freeman passe la soirée dans une immense bibliothèque pour tenter de résoudre le mystère du tueur fasciné par les sept péchés capitaux, tandis que le jeune chien fou incarné par Brad Pitt examine en vain des preuves chez lui.

    Et pendant que la caméra du chef opérateur Darius Khondji suit Morgan Freeman dans les allées avec des plans et des mouvements parfaitement fluides, on entend l'élégance de l'air le plus célèbre de Bach, lancé dans la bibliothèque par des gardiens de nuit qui se réunissent pour jouer au poker, au grand désespoir de l'inspecteur qui se plonge dans le contenu un peu violent de l'Enfer de Dante dans La Divine Comédie. Meilleure publicité de l'histoire pour les bibliothèques et la curiosité intellectuelle.

    4. Trent Reznor, Atticus Ross et Karen O – Immigrant Song (Millénium : Les Hommes qui n'aimaient pas les femmes, 2011)

    Après The Social Network, Trent Reznor et Atticus Ross ont remis ça dès l'année suivante avec la bande-originale très sombre de Millénium, où une reprise se distingue encore, même si le leader de Nine Inch Nails a d'abord eu très peur de s'y frotter.

    Car cette fois, il s'agit d'une version apocalyptique du Immigrant Song de Led Zeppelin, que l'on peut entendre dans le générique d'introduction du film, sans doute le plus beau de la filmographie de David Fincher.

    Chanté par une Karen O (des Yeah Yeah Yeahs) survoltée qui n'a presque rien à envier à Robert Plant, le morceau semble né pour accompagner ce générique abstrait et d'un noir cauchemardesque, qui a nécessité douze semaines de travail pour 10 motion designers sur autant de logiciels. La Lisbeth Salander géniale jouée par Rooney Mara et au cœur de ce générique méritait bien ça.

    3. The White Stripes – Ball and Biscuit (The Social Network, 2010)

    Dès l'apparition du logo du studio Columbia, on entend les premières notes du riff de guitare de Jack White, sorti en 2003 sur un célèbre album, "Elephant". Le morceau des White Stripes semble passer dans le bar où Jesse Eisenberg et Rooney Mara – qui incarnent respectivement Mark Zuckerberg et sa copine Erica Albright – échangent autour d'une bière sur les final clubs de Harvard qui fascinant tant le futur patron de Facebook.

    Complètement imbuvable, ce dernier ne met que quelques minutes pour se faire larguer après cinq minutes de dialogues effrénés qui figurent dans le panthéon du scénariste Aaron Sorkin. La tension latente de cette scène qui ressemble à un match de boxe est renforcée par le titre joué en arrière-plan, et les solos de guitare semblent coïncider avec les moments où les répliques les plus assassines sont envoyées. Meilleure scène d'intro de la carrière de David Fincher, au minimum.

    2. The Pixies – Where Is My Mind? (Fight Club, 1999)

    Comment faire changer de dimension une chanson ? La faire jouer à la fin du film culte d'une génération peut aider. C'est ce qui est arrivé à ce morceau des Pixies, que l'on entend dans la scène finale mythique de Fight Club, où le narrateur et Maria se tiennent la main devant les gratte-ciels qui s'effondrent devant eux. C'est visuellement renversant, et Where Is My Mind? apporte la touche finale rêvée à ce moment, en résonance parfaite avec la thématique du film.

    1. The Beatles – Baby, You're a Rich Man (The Social Network, 2010)

    Mais en matière de scène de fin mémorable, on ne fait pas mieux que les dernières minutes de The Social Network. En écho à la scène d'intro évoquée juste au-dessus, Mark Zuckerberg est cette fois seul face à son ordinateur.

    Après avoir ajouté son ex sur son réseau social, ce morceau très à propos des Beatles se lance. Le créateur de Facebook actualise frénétiquement la page dans l'espoir de voir une réponse positive, tandis que de brefs textes incrustés se concluent par "Mark Zuckerberg est le plus jeune milliardaire au monde", sur le visage vide et déprimé de celui qui s'apprête à gagner sa bataille judiciaire.

    Une scène d'une solitude déchirante, et la conclusion idéale d'un chef-d'œuvre qui continue de nous hanter autant que la voix de John Lennon chantant Baby, You're a Rich Man.

    Se7en, The Game, Millénium : Les Hommes qui n'aimaient pas les femmes et L'Étrange Histoire de Benjamin Button sont actuellement visibles sur myCANAL.
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