25 ans après, l'histoire du premier album incompris des Daft Punk : "Homework"

C’était le 20 janvier 1997. Les Daft Punk, après le succès de leur maxi « Da Funk », viennent de sortir leur tout premier album. Sans faire l’unanimité chez une certaine presse spécialisée, le duo casqué en écoulera tout de même plus de 2 millions de copies à travers le monde.
  • En France, il y a eu quelques critiques de cet album qui, 25 ans plus tard, restent presque aussi célèbres que le disque en lui-même. Sans directement les nommer, certains médias s’amusaient à comparer les frenchies à « Herbie Hancock faisant le pingouin avec ses robots » ou à « cet infâme connard de Giorgio Moroder  ». Qu’à ne cela ne tienne, l’eau a depuis coulé sous les ponts. 

    Aux origines de ce disque, on retrouve deux amis, Guy-Manuel de Homem-Christo, 22 ans au moment des faits, et Thomas Bangalter, 21 printemps. Ils se sont rencontrés sur les bancs du lycée Carnot, à Paris. Après un essai non concluant dans le monde du rock, ils se passionnent pour les musiques électroniques et l’art du sampling. Perchés sur la butte Montmartre où ils résident, enfermés dans une pièce d’à peine 10 m2, les complices s’attellent à la confection de ce fameux premier album.

    À l’intérieur de cette chambre qui a tout du parfait cabinet des curiosités pour les fanatiques d’électronique, se cache un véritable home studio : au sol, il y a des câbles en pagaille et chacun connecte des ribambelles de synthétiseurs, de boîtes à rythmes et autres machines éparpillées. Tels des esthètes flamboyants animés par cette volonté d’essayer les idées les plus folles, ils bidouillent leurs matos et redoublent d’inventivité dans la façon de créer leur musique. En composant de chez eux, ils font aussi exploser cette légende qui voudrait que chaque disque se fasse en studio, décomplexant dans la foulée les musiciens électroniques avides de faire eux aussi leur « Homework ». La French Touch peut commencer.

    Dans une interview que le boss de Ed Banger, Pedro Winter, accordait à Télérama en 2014, il détaillait ce bouillonnement :

    « Je me souviens de Thomas branchant une pédale de guitare sur un synthé et de m’être dit qu’il était devenu fou. Mais au final, ça fonctionnait si bien que le résultat était réellement dingue. Un titre comme Alive reste de la house, mais avec le son de batterie d’AC/DC ! »

    Ce pont entre les genres et les outils que leur ancien manager met en valeur constitue précisément l’une des spécificités de ce disque, bien plus complexe qu’une simple autoroute techno.

    Si Thomas et Guy-Man sont des « fans absolus du label Dance Mania de Chicago » — dixit Pedro Winter dans la même interview —, ils ont réussi à transcender cette musique en la gonflant d’influences diverses. Il y a d’abord la ghetto-house, une enfant de la house dont ils citent leurs artistes phares dans le morceau Teachers : « Paul Johnson ! DJ Funk ! DJ Sneak ! DJ Rush ! » 

    Comme un fantôme du passé, le rock revient les hanter. Ce genre que les snobs de l’époque disaient mort s’affiche fièrement sur et dans la pochette de « Homework ». De la typo en couverture qui rappelle les Rolling Stone en passant par la photo intérieure où l’on peut voir un poster de Kiss, à côté d’autocollants de Led Zeppelin et des Who... les références ne manquent pas. Pour le côté religieux, il y a une la Sainte Bible, et un petit jeton estampillé « Rex », le nom d’un club parisien qui dans les late nineties est une sorte de Mecque techno.

    « Homework », en plus de toutes ces influences visuelles et sonores, est surtout un disque qui contient des chansons cultes. Outre Da Funk et Alive mentionnées un peu plus haut, qui peut encore dire en 2022 ne pas connaître Around the world, dont le clip tout aussi culte a été réalisé par Michel Gondry ? Les classiques côtoient des titres moins accessibles de prime abord, mais tout aussi jouissifs, tout aussi festifs, comme Rollin’ Scratchin, une ode quasi bruitiste aux free-parties chères à Guy-Man.

    Plus qu’une fin en soi, cet album marquera le début de la folle ascension de Daft Punk. Celle de deux Français aux visages (presque) inconnus et devenus avec le temps de véritables icônes. Deux artistes qui ont fait rayonner notre savoir-faire à l’international, atteignant sûrement leur zénith en 2014 : année où leur (dernier) album « Random Access Memories » a été auréolé de cinq Grammy Awards, pour cinq nominations.

    Puis en février 2021, après une longue période de silence, le duo se séparera. L’air de rien, sans commentaire, si ce n’est l’impression de dire une ultime fois « on se lève et on se cass(qu)e  » ; comme le titrait Libération

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