Il y a 20 ans, le "2001 " de Dr. Dre changeait le hip-hop à tout jamais

En novembre 1999, le docteur californien débarquait avec un deuxième album rapidement intouchable, porté par des tubes qui alliaient modernité et succès. La définition même d'un chef-d'œuvre, en quelque sorte.

Toute puissance. À en croire le son THX placé en introduction, « 2001 » est un blockbuster. Il en a le succès (13 millions d’albums écoulés à ce jour), la portée (allez demander à des producteurs comme Sayd des Mureaux, Skread ou Kanye West ce qu’ils en pensent) et le casting. Quelques années après avoir révélé Snoop Dogg sur « The Chronic » , Dr. Dre profite même de ce deuxième album solo pour mettre en avant son nouveau poulain, Eminem, avec qui il semble avoir trouvé un nouveau souffle créatif.

« Cette période de ma vie, musicalement parlant, était complètement détraquée, rembobinait-il aux Inrocks. Je n’étais pas dans le coup et j’essayais de trouver ma voie. C’est quelque chose qui arrive chez les artistes. Ce fut l’un de mes plus grands moments de doute, alors qu’en façade on faisait tous comme si tout allait. Tout ne va pas toujours comme on le voudrait, mais j’essayais de trouver ma voie et heureusement, Eminem est arrivé à point nommé. »

Explosif. Au-delà de son casting, « 2001 » (régulièrement nommé « Chronic 2001 ») est également un disque de producteur. Celui d'un artiste qui, à l'image des méthodes autrefois employées par Motown ou Stax, choisit de s'entourer d'une véritable armada de beatmakers (Mel-Man, Scott Storch, etc.), celui d'un talentueux chef d'orchestre qui a l'intelligence de faire intervenir des musiciens afin de rejouer des lignes mélodiques empruntées à d'autres artistes (l'un des rares samples de l'album étant Parce que tu crois de Charles Aznavour sur What's The Difference). Celui que l'on imagine, tel un laborantin, en train de bidouiller et triturer sans relâche ses machines jusqu’à obtenir le résultat désiré. 

« Dre est difficile à suivre en studio, racontait Xzibit dans une interview à RER. Il a 20 idées à la minute mais comme il n’est pas dilettante, il les met toutes en œuvre. Et tant que ce que tu fais ne rentre pas dans sa case, tu recommences, tu réécris ou tu rejoues tes parties. Ça peut durer des jours. »

Le son du 21ème siècle. En 1999, une époque où le hip-hop américain commence à délaisser l’axe Est-Ouest, « 2001 » sert de tampon : il vient rappeler l’importance du son West Coast (Some LA Niggaz, où Dr invite la crème et les jeunes pousses du rap californien de l’époque), du gangsta-rap (« Je représente pour les gangstas autour du monde, je traine toujours aux coins de rue dans des belles caisses », rappe-t-il sur Still D.R.E) et de la nécessité de réunir les talents de tous horizons autour d’un même projet – rappelons qu’Eminem (Détroit), Jay-Z (New York) ou encore The D.O.C. (Los Angeles) ont ghostwrité certains textes.

L’important, au final, est d’être au service des morceaux, de ces tubes crapuleux qui annonçaient le 21ème siècle et qui étaient visiblement pensés pour être écoutés dans un lieu spécifique : « Je ne fais pas des morceaux pour les clubs ou la radio, disait-il dans une interview au New York Times en 1999, comme pour rappeler que le premier titre de l'album était une ode aux lowriders. Je fais du son pour que les gens roulent avec dans leur caisse. Je suis sûr que c’est là que la plupart des gens écoutent ma musique : dans leur voiture. »