Grand Corps Malade, grand oublié des Victoires de la musique 2022 ?

S’il n’est pas le seul à avoir été injustement oublié par la 37ème cérémonie des Victoires, diffusée le 11 février en direct de la Seine Musicale, le slammeur parisien est celui qui a le plus clairement affiché son mécontentement. À juste titre ?
  • Mansfield.TYA, Ninho, Lujipeka, Damso, Laylow, La Femme : nombreux sont les artistes à pouvoir regretter leur absence de la 37ème édition des Victoires de la Musique. Certains s’en moquent ouvertement : « Je n’irai pas aux Victoires de la musique, j’ai une deuxième partie d’album à sortir », disait Sopico. Pour d’autres, en revanche, la pilule est nettement plus difficile à avaler. « Je ne m’y attendais pas », a ainsi déclaré Grand Corps Malade sur TF1, conscient d’avoir probablement réalisé la meilleure année de sa carrière sur le plan comptable : 500 000 disques écoulés, 120 concerts, une quarantaine de Zénith, etc.

    « On est dans les meilleures ventes d'albums. On a une tournée, qu'on a déjà démarrée. On fait plus de quarante Zénith. On a un Bercy d'ouvert. C'est un peu notre année. Cette année-là, d'être complètement absent, de ne même pas être nommé dans aucune catégorie, on était déçus, c'est vrai ».

    Pour expliquer cette absence, plusieurs arguments pourraient être avancés. Son album est sorti en 2020 ? Celui de Julien Doré également. « Mesdames », contrairement à une cérémonie qui semble vouloir mettre en lumière la pop et l’expression rap, est-il trop ancré dans le format chanson ? Peut-être, mais cela n'explique pas la présence de « Géographie du vide » d’Hubert-Félix Thiéfaine dans la catégorie « Album de l’année ». Alors, quoi ? Sur TF1, toujours, Grand Corps Malade privilégie une piste empruntée l’année dernière par Bénabar : celle de la corruption.

    « Il y a une répartition entre les maisons de disques qui est compliquée, explique-t-il. Avec mon producteur, Jean-Rachid, on a un petit label indépendant. Dans tout le label, on a un votant, c'est moi. Sauf que les majors, ils ont 45 votants et ne vont pas voter pour un artiste qui est sur un label indépendant. Ils vont voter pour leurs artistes, c'est normal. Du coup, forcément, ça interroge sur le système de vote ».

    Au fond, le mécontentement de Grand Corps Malade pose de nombreuses questions, toutes essentielles : doit-on encore prêter attention à une cérémonie qui, chaque année, se fait brocarder pour son manque de représentation des genres musicaux, et l’absence de diversité qui va avec ? Un artiste à qui tout sourit sur le plan commercial doit-il obligatoirement figurer parmi les nommés, surtout quand un extrait de son disque (Mais je t'aime, en duo avec Camille Lellouche) a déjà été récompensé en 2021 ? Ce même artiste a-t-il vraiment besoin de cette reconnaissance critique quand ses ventes, elles, ne faiblissent jamais réellement ?

    À l’évidence, tout est une question de chiffres. Ainsi, Jain a vu les ventes de « Zanaka » bondir de 48% suite à sa Victoire en 2017, tandis que « La fête est finie » d’Orelsan s’est hissé au sommet du top album dans la foulée de ses trois récompenses en 2018. Sachant les enjeux financiers que représentent une telle présence (sans compter les dates de concert qui affluent, le public qui grandit), on comprend mieux pourquoi Grand Corps Malade, malgré ce coup de gueule, ne souhaite pas fermer la porte à une future nomination : « Si l’année prochaine, ils votent pour moi, je serai content d’y aller », affirme-t-il, quitte à passer pour ce pote qui passe son temps à vous insulter tout en espérant être invité à la prochaine fête d'anniversaire.