2019 M05 6
Corbeil-Essonnes style. Plus que n’importe quel autre genre musical, le rap français peut se définir en partie par zones géographiques. Si les départements du 93 et du 94 sont devenus mythiques et symbolisent à eux seuls une certaine esthétique, le 91 jouit lui aussi depuis quelques années d’une attention particulière. PNL y est évidemment pour beaucoup, tant les frères Andrieu ont placé la cité des Tarterêts, et plus largement Corbeil-Essonnes, sur la carte des lieux qui comptent – ce n’est pas pour rien si des rappeurs comme Sefyu et Booba y font désormais référence dans leur texte.
« Le zoo ». Pour Ademo et N.O.S., cela aurait pourtant pu être bien différent quand on sait qu’ils ont dû suivre leur père en Corrèze pendant plusieurs années – ce que le clip de Deux frères vient d'ailleurs rappeler. Seulement voilà, Tarterêts, c’est leur ville, c'est là où ils ont grandi, là où ils ont décidé de retourner vivre, là où ils ont choisi d'aller célébrer leurs disques d'or – en mode QLF, donc.
Mais ce ne sont pas les seuls. Depuis la fin des années 1990, la cité est parfois surnommée « Tarterêts Zoo », en référence au Brooklyn Zoo d'Ol' Dirty Bastard, et ce n'est évidemment pas un hasard. C'est une ville sauvage, biberonnée au hip-hop et portée par divers rappeurs : Bizon et Mental, présents aux côtés d'Oxmo Puccino ou La Brigade sur la compilation « L’univers des lascars », mais aussi Don Xeré Delavega, bien connu des adeptes du « Cinquième As » de MC Solaar.
QLF. « Les Tarterêts c'est comme si tu avais une ville dans la ville. On oublie presque que c'est juste un quartier. Il y a plusieurs équipes, plusieurs endroits clés, etc. Chacun a son délire. » Dans une interview à Noisey, Mental revient sur la richesse de la cité : « La musique a toujours été au cœur du Zoo. Seulement les gens ne peuvent pas le savoir parce que ça ne sortait pas à l'extérieur. On a fait tellement d'albums qui sont jamais sortis. Même les Kery, Rohff, Rim'K et Booba, ils savent. »
Fidèle au quartier. Depuis, l'ambition a quelque peu évolué. Des mecs comme F430, S-Pion ou MMZ continuent de raconter le blues du dealer, de parler aussi bien de bicrave que d'affaires de familles (une tradition locale, en quelque sorte), mais font désormais entendre leur nom et celui des Tarterêts à l'échelle nationale. Plus fort encore : tous ces artistes profitent également de leurs clips pour afficher l'architecture du quartier, ses grands ensembles comme ses halls décrépits. Avec fierté, malgré tout : « Une chance qu'ils aient pas détruit mon bâtiment, peut-être qu'un jour j'pourrai l'montrer à mes enfants », rappe PNL sur Chang.