2021 M06 23
Nous sommes en 2021, et toute la France achète ses disques à la Fnac ou en ligne. Toute ? Non ! D’irréductibles disquaires résistent partout en France, et notamment en Armorique. Dans le Finistère, non loin de Morlaix, sur l’axe reliant Roscoff à Lorient, se trouve Plounéour-Ménez (ça ne s’invente pas !). À l’entrée de ce village se trouvait une station service, désaffectée depuis longtemps. Installé à quelques pas, David Bazin, 49 ans, pur breton vivant de boulots alimentaires, a alors une vision. C’est dans ce lieu insolite qu’il va réaliser un projet rêvé depuis de nombreuses années : ouvrir un disquaire.
Un projet finalement réalisé le 3 mars 2020, jour d’ouverture de La Boutique. À croire que toutes les réserves d’originalité étaient déjà prises par le local... Problème : quelques jours à peine après l'ouverture, voilà que la pandémie l’oblige à fermer. David prend son mal en patience, ne lâche rien et, désormais catégorisé « commerce essentiel », prend le temps de développer son activité comme il l’entend. Après tout, c’est mû par sa seule passion qu’il mène sa barque : tous ses vinyles, CD, cassettes ou livres sur la musique sont des coups de coeur personnel, et aucun compromis commercial n’est envisageable. « Si les gens ne sont pas contents, ils n’ont qu’à aller à la Fnac », déclare-t-il au journal local le Télégramme.
Mais qu’on se rassure : David est un curieux, passionné par toutes sortes de musiques. Si ses premiers amours vont vers le rock et le punk, il est également un grand amateur de jazz, de musiques expérimentales, et de tout autre style capable de le charmer. Son premier stock vient d’ailleurs de sa collection personnelle de 2000 disques. Dans les bacs du magasin, on peut trouver des nouveautés pointues, celles du label jazz rock lyonnais Dur & Doux, des punk de Teenage Menopause, mais aussi des grands classiques : Beatles, Rolling Stones, Frank Zappa, John Coltrane, etc. « Les trois-quarts des gens viennent pour prendre leur Beatles ou leur Stones » explique-t-il à France 3. « Et puis il y a ceux qui ont envie de découvrir, d’être surpris.
Pour les premiers comme les seconds, le vendeur travaille son accueil. Si l’extérieur est étonnant, avec sa peinture qui s’écaille et le vide laissé par l’absence de pompes, l’intérieur est tout confort. Des fauteuils sont placés aux coins du magasin, permettant d’écouter tranquillement les disques. Car, comme chez tout bon disquaire, il est possible d'écouter ses futurs achats sur place, de passer plusieurs heures à échanger avec le gérant, à partager ses coups de cœur.
Car David est de ceux qui croient dur comme fer dans le plaisir du partage et de la découverte. Comme il le raconte au Télégramme : « La musique, c’est avant tout des rencontres et du partage. C’est pour cette raison que j’ai toujours voulu faire ce métier ». Depuis peu, il accueille également quelques concerts, à l'image de ce duo de violon et de percussions indiennes venu performer le 7 juin dernier. Bref, le projet transpire la passion par tous les pores, faisant de la Boutique un nouveau lieu prisé par les diggers bretons. Et puis quoi de plus symbolique, de nos jours, que de remplacer l’essence par ce carburant bien plus puissant qu’est la musique ?