2020 M05 18
Pour certains artistes, on pourrait, croire que le succès arrive comme un cheveu sur la soupe. Mais pour Dua Lipa, 24 printemps, il s’est construit sur un peu plus de cinq années où l’évolution a été notable, comme une montée en puissance, sans brûler les étapes, dans le monde la pop.
Est-ce que ça vient de ses origines, puisque le papa est un réfugiés albanais parti de Pristina pour Londres en 1992 ? Du fait qu’elle soit repartie du Kosovo en 2008 à l’âge de 15 ans pour retrouver Londres et devenir indépendante encore adolescente ? Ou du fait qu’elle ait été « videuse » dans une boite de nuit de la capitale anglaise ? Probablement un peu des trois. Mais c’est surtout dans sa musique, et auprès d’artistes comme Calvin Harris ou encore Stromae, qu’elle s’est forgée son identité.
Avant de signer son premier album en 2017, l’adolescente poste des vidéos sur YouTube où elle reprend notamment des tubes de Christina Aguilera ou P!nk. Elle se fait repérer et entame donc la composition de « Dua Lipa ». Elle refuse les collaborations pour sortir en premier sa musique, et montrer son univers avant de le partager avec d’autres. « Les collaborations, c’est un terrain dangereux : parfois la chanson ne reflète pas qui tu es en tant qu’artiste ou personne, et les gens le font juste pour faire un hit. Je n’y crois pas. Donc j’ai attendu de me faire connaître et qu’on connaisse ma voix avant d’en accepter », confesse la chanteuse au journal Evening Standard.
Sur « Dua Lipa », la jeune de 21 ans s’impose, et même si la musique est loin d’être au niveau d’une Adèle ou d’une Lady Gaga, elle a le mérite d’être franche, assumée et ouvertement pop. Si elle a refusé les collaborations à ses débuts, Dua Lipa a quand même été épaulé sur ce disque, notamment par Chris Martin de Coldplay avec qui elle a co-écrit Homesick. Le genre de chanson, avec New Rules, qui peut vous convaincre de croire en elle.
Libérée, Dua Lipa s’ouvre donc aux collaborations. D’abord avec Calvin Harris, faiseurs de tubes depuis plusieurs années. Ensemble, ils sortent One Kiss (co-écrit avec une certaine Jessie Reyez, star montante de la pop US), tube qui tourne sur toutes les ondes et se classe en haut des charts. Entre temps, elle rencontre Stromae qui s’occupe de son clip pour le morceau IDGAF, chante pour la finale de Champions League à Kiev, monte sur scène au Grammy aux côtés de St. Vincent, continue les collaborations (Mark Ronson, Diplo) et devient la star d’une pub pour Yves Saint-Laurent. La question : Dua Lipa est-elle en train de devenir un produit marqueté taillé pour les stades et les millions de vues ? Fatalement, oui. Mais elle n’a pas dit son dernier mot.
Durant le confinement, la Britannique avance la sortie de son nouvel album (il a leaké) « Future Nostalgia », biberonné par ses amours d’adolescente (Madonna, Blondie ou encore Outkast). Un album qui n’a (presque) rien à voir avec le premier. Elle troque la pop en chewing-gum pour de la disco, de la funk et des chansons moins prévisibles et plus abouties (Pretty Please, Don't Start Now, Good In Bed)
Aux côtés des artistes avec qui elle a collaboré, Dua Lipa a su vite progresser et piocher là où il fallait pour nourrir sa musique. Un disque « madeleine de Proust » pour ceux qui ont connu les années 80 et 90, la culture club, les tubes en pagailles et Kylie Minogue. Elle parvient à donner un second souffle à la pop, celle qu’on adore détester, mais sur laquelle on ne peut s’empêcher de danser et de chanter. C’est là où l’on s’aperçoit que Dua Lipa n’est pas une recette marketing duplicable à l’infini mais une artiste qui se construit. C'est précisément ce qu'on peut entendre sur "Future Nostalgia".