Les Irlandais de Fontaines D.C. sont-ils le phénomène rock de 2019 ?

C'est la question posée à l'écoute d'un premier album (« Dogrel ») post-punk insolent et urgent, du genre à s’écouter à la bave aux lèvres. Et comme les garçons portent aussi en eux Dublin City (le D.C. de leur patronyme), on a pris le temps de leur demander de nous raconter cette ville d'où tout est parti.

C'est l'histoire d'un groupe... Chez Fontaines D.C., le rock se joue très fort, et ne s'écoute pas en se caressant la barbe avec un air érudit. C'est un défouloir, un cocktail explosif de guitares tranchantes et de cris rageurs fait pour suer de la mauvaise bière en concert. On ne criera pas aux sauveurs du rock – terme sans doute trop gros pour ces cinq Irlandais de 20 ans et des poussières -, mais leur premier album (« Dogrel ») est suffisamment sauvage pour qu’on ait eu envie d’en savoir plus sur leur vie à Dublin. Et c'est le batteur, Tom Coll, qui s'y colle.

Dublin Calling. « Avec notre rythme de vie et les tournées qui s’accumulent, c’est impossible de passer énormément de temps à Dublin ces temps-ci. Donc quand on revient ici, c’est à chaque fois pour se relaxer, dans un coffee shop ou au cœur de Drury Street/William Street, qui sont probablement les rues les plus cool de Dublin pour trainasser. Par exemple, il y a le Grogan's, où tu peux boire ta pinte de Guinness tranquillement, ou, un peu plus loin, le Workmans Club, où tu peux terminer ta soirée avec un dernier verre. Pour nous, c’est d’ailleurs un lieu important : il peut accueillir jusqu’à trois cent personnes, et ça été l’un des premiers spots à nous avoir permis de jouer. On y a fait nos premières armes. »

Rock culture. « Ces cinq dernières années, on sent que Dublin est portée par une nouvelle génération de groupes à guitares, et c’est vraiment excitant de voir que l’on a pu grandir au sein de cette effervescence. Quand on a commencé, on jouait essentiellement dans de petits lieux, on galérait à trouver des groupes avec qui partager l’affiche. Aujourd’hui, tout va pour le mieux, et de nouveaux groupes comme Just Mustard, Melts et The Murder Capital contribuent à ça. Tout comme Girl Band, à qui de nombreuses formations doivent beaucoup, nous y compris.

Ce qui est juste regrettable, c'est que des salles de concert mythiques, comme le Tivoli Theatre, où The Prodigy et Oasis ont donné leur premier concert à Dublin, sont aujourd'hui remplacées par des hôtels de luxe... Pareil, il y a des studios qui restent accessible, comme le Darklands Audio, où on a enregistré nos premiers singles, mais ça devient compliqué de financer l'enregistrement d'un album dans un studio dernier cri... Heureusement que des associations financées par l'État comme FIrst Music Contact soutiennent les petits groupes et les aident à se lancer. »

Working class hero. « Sur l'album, on a une chanson qui s'appelle Dublin City Sky, c'est une façon pour nous de rendre hommage à cette ville, et à l'Irlande en général. Les choses changent ces dernières années : deux référendums ont été favorables au mariage pour tous et au droit à l'avortement, tandis que des campagnes comme “Take Back The City” permettent de lutter contre la crise du logement et aident les sans-abris.

Ce sont des causes qui nous touchent particulièrement sachant que Grian n'avait pas vraiment de lieu à lui il y a encore quelques années. Il voguait d'appartement en appartement. Mais bon, nous ne sommes pas un groupe politique pour autant. Les chansons de Fontaines D.C., ce sont avant tout des commentaires sociaux. »