2019 M03 25
Réinvention. Scott Walker, c'était l'histoire d'un des plus grands musiciens des cinq dernières décennies, l'un des rares à avoir toujours su se réinventer sans se soucier des modes et des tendances, mais simplement par besoin de fuir l'immobilisme et l'inertie.
L'Américain, c'est sûr, aurait pu surfer sur le succès hystérique de ses débuts au sein des Walker Brothers, porté par ces tubes imparables de teenage-pop qu'étaient Make It Easy On Yourself ou The Sun Ain't Gonna Shine Anymore. Mais il faut croire que Scott Walker, né dans l'Ohio mais exilé à Londres dans les années 1960, était autre chose qu'un crooner majestueux.
Tango funèbre. C'était un musicien curieux, ouvert à tous les possibles, qui introduit le répertoire de Jacques Brel en Angleterre à la fin des sixties - ce qui influença directement David Bowie. Depuis, nombreux sont les musiciens à avoir trouvé refuge et inspiration dans les étoffes orchestrales de ce bon vieux Scott : Alex Turner, Pulp, Nick Cave, Radiohead (parfois), Richard Hawley, Lou Reed ou encore Etienne Daho et Alain Bashung en France, tous ont visiblement grandi en écoutant les classiques du bonhomme, notamment sa suite de quatre albums sobrement intitulés « Scott I », « Scott II », « Scott III » et « Scott IV ».
Hommage. Un de ses standards s’appelait My Death. Elle a malheureusement fini le faucher la nuit dernière, laissant orphelins le monde de la musique, la pop et son label (4AD), qui en parle comme d'un « artiste solo, producteur et compositeur d'une originalité sans compromis ».
Scott Walker, c'était évidemment bien plus que ça - un songwriter aux désirs raffinés, un lyriciste sous-estimé, un fan de symphonies ambitieuses, un vieux monsieur prêt à frotter sa voix à l'extrêmisme sonore de Sunn O ))) -, mais il était, c'est vrai, ce musicien sans compromis, terriblement lucide (« Je ne suis pas la personne la plus forte au monde ») et torturé : « J’étais tellement heureux que je me sentais un autre ».