Rencontre avec Benjamin Clementine, l'alien de la pop

  • Avec son nouvel album "I Tell A Fly", l’ex chanteur du métro change de ligne.

    Quelle mouche a piqué Benjamin Clementine, le Britannique au destin romanesque, passé de chanteur du métro à vainqueur du Mercury Prize ? Son piano-voix filait droit dans les mémoires mais il a depuis pris un ticket pour les montagnes russes. Jack est allé à la pêche aux infos auprès de Benjamin Clementine à Paris pour discuter de son mouvement perpétuel.

    L’album commence avec Farewell Song, était-ce un au revoir à ta vie d’avant ?

    Ce titre porte l’idée qu’on va tous quelque part, qu’on est toujours en mouvement. Dans la rue les gens bougent, les oiseaux volent. Tout de suite tu bouges ta main ici puis là, c’est un continuum. Ça veut dire qu’il faut toujours dire au revoir et avancer.

    Pourquoi avoir choisi une mouche (« a fly« ) plutôt que, banalement, des oiseaux, comme personnage pour cet album ?

    Les mouches peuvent être aussi des oiseaux ! Je les ai choisies car elles ne sont d’aucune importance pour nous. Quand on voit une mouche, on lui dit de partir. C’est presque ironique, j’essaie de faire comme si cet album n’était pas important, alors qu’en fait, il l’est.

    Que cherchais-tu en partant t’installer à New York pour écrire cet album ?

    Je cherchais un nouveau décor, puis quand je suis allé chercher mon visa, le document disait que j’étais un alien. Je me suis dit d’accord, je dois en faire quelque chose. J’ai appris à connaître l’atmosphère là-bas, les gens, les paysages, ça m’a affecté.

    Et tu en es revenu avec une forme d’opéra baroque et d’avant-garde…

    Là-bas j’ai découvert le compositeur japonais Isao Tomita, qui a recomposé le travail de Debussy de façon électronique. J’ai eu envie d’essayer de faire un album autour de ce son. Et j’ai aussi lu beaucoup de poésie américaine là-bas, Joyce Kilmer en particulier.

    God Save The Jungle dépose en plein cirque un piano qu’on imaginerait plutôt dans un salon huppé…

    Mon idée c’est que le monde est une jungle et nos dirigeants agissent comme des singes et des animaux. Certains hommes semblent n’avoir jamais évolué…

    Y’a-t-il un double hommage à Phantom Of The Paradise et aux Syriens sur Phantom Of Aleppo Ville ?

    Non, je suis d’abord une voix pour les êtres humains et surtout pour moi-même. La situation à Alep m’affecte mais ce n’est pas un titre sur les Syriens directement. J’ai appelé ce titre ainsi pour attirer l’attention, ça parle des enfants mourant partout dans un monde pas assez bon pour prendre soin d’eux. C’est aussi sur les enfants qui sont malmenés, tout comme j’ai pu l’être à l’école.

    Cet album est sans concessions, tu as dit au Guardian que tu préfèrerais retourner jouer dans le métro plutôt que d’en faire…

    Je ne voudrais pas revenir dans la rue et jouer, car c’est mon passé. Mais bien que je comprenne que tout ça est un business, je dois faire ce que j’ai à faire. Retourner jouer en studio, ce n’était pas si éloigné de ce que je faisais avant ; à part que cette fois les gens font attention à moi, qu’ils me paient plus et que je me retrouve sur les réseaux sociaux. Mais c’est la seule différence.

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