2019 M10 2
On a parfois du mal à décrire ce que certains appellent le syndrome « singer next door », soit cet artiste du palier d’à côté qu’on entend à travers la cloison et qui, avec ses chansons intimes, vous donne l’impression qu’il ou elle pourrait être votre meilleur pote. On retrouve un peu tout ça sur « Immunity », premier album de Clairo sorti cette année, qui vient consacrer un buzz internet déjà vieux de deux ans. Évidemment, les habitués du Hellfest trouveront tout ça un peu cucul, mais les fans de Videoclub seront bien heureux d’apprendre qu’il existe d’autres gamins capables de pondre des mélodies fragiles sur de petits synthés.
Symbole de la génération TMFL (Toi-Même Fais-Le), la jeune Américaine a visiblement tout appris toute seule, dans sa chambre (cf. l’expression bedroom pop), sur le logiciel Garageband. Tout cela s’entend sur « Immunity », et éviter de penser très fort à Mac DeMarco est forcément un peu difficile. Pour elle, tout a débuté vers 14 ans quand celle qui a déjà ouvert pour Dua Lipa commence à balancer, sans complexes, ses reprises de Mumford & Sons ou Frank Ocean. La suite lui a donné raison. C'est son innocence qui a plu aux communautés d'internet, lassées des mimétismes de starlettes qui ne passent pas l’hiver.
C’est peut-être aussi le signe que cette génération post Myspace préfère les artistes qui lui ressemblent. De ce point de vue, les débuts de Clairo ne sont pas sans rappeler ceux de Lana Del Rey. Les deux ont en commun d’avoir eu un papa qui les a poussées dans le dos (celui de Clairo est un ancien responsable marketing chez Coca-Cola et Converse), et les deux musiciennes peuvent aussi se targuer de posséder de belles collections de haters (qui leur reprochent d’être des produits fabriqués par l’industrie).
Mettons tout ça de côté : « Immunity » est un album de pop insouciante parfaitement imparfait, et c’est ce qui lui donne ce côté bricolé attachant. En synthèse : si vous ne pouvez déjà plus piffer Billie Eilish, jetez-vous sur elle.