2018 M05 23
La loi de Murphy. Dans le monde réel, c’est une loi scientifique qui veut que « tout ce qui est susceptible de mal tourner, tourne mal ». Dans le monde d’Angèle, c’est tout l’inverse : chaque mois qui passe est l’occasion pour la Bruxelloise de vérifier qu’elle est désormais bien plus que la sœur de Roméo Elvis et qu’en fait, tout va de mieux en mieux.
Ainsi donc, celle qui ne dispose que de deux titres en écoute sur Spotify (Je veux tes yeux et La loi de Murphy) affole pourtant les compteurs. La dernière fois qu’on l’a vue à Paris, c’était à l’Olympia en ouverture pour Damso. Six mois plus tard, c’est elle qui mène la danse dans un Trianon rempli rien que pour elle. Comment, pourquoi ? Mystère. Ce qu’on sait, c’est que tout le monde semble déjà prêt à chanter les morceaux du premier album qui se fait attendre et sortira, selon les infos, à la rentrée via Initial Artist Services (IAS), la division développement d’Universal où l’on trouve déjà Eddy de Pretto ou Clara Luciani.
20.55, top départ. Sur scène, des claviers, un vrai groupe et Angèle qui entre finalement sous les applaudissements d’un public un peu bazar comme on dit à Bruxelles. Il y a de tout : des filles (beaucoup), des mecs (plus que prévu), des gamins, des trentenaires ; Angèle, en dépit de son jeune âge, fédère déjà large. Et semble elle-même s’étonner de l’engouement autour de sa personne : « C’est dingue, on n’est même pas à Bruxelles et ce concert est sold out depuis janvier ! »
Dans la setlist, il y a un morceau « sur la thune et Instagram », un autre nommé Big Shit « qui parle de nous quand on se regarde sur les réseaux sociaux et qu’on a l’impression d’être des grosses merdes ». C’est à se demander si les historiens parviendront dans un siècle à déchiffrer toutes ces chansons qui parlaient d’Instagram. On est bien les seuls à se poser la question du reste. La foule, massée, est conquise. On surprend même des garçons ayant dépassé la trentaine en train de chanter les paroles à voix basse.
Quand soudain, Solaar. Peu à peu, Angèle parvient à imposer son rythme et son style fait de déhanchés zouk et de ballades plus posées, au clavier. « On dit que les Parisiens sont chiants, moi j’ai pas l’impression », taquine-t-elle entre deux morceaux. La foule se marre, encore. Sur La loi de Murphy, premier mouvement de foule, et impression d’assister au concert d’une musicienne déjà là depuis dix ans, avec son tube chanté en chœurs. C’est tout l’inverse : Angèle est là depuis seulement six mois. Dingue.
« Y’a tellement peu de filles qui font du rap qu’on croit que je fais du rap », se marre-t-elle, en sueurs. Bruit dans la salle, tout le monde croit à une intro pour faire venir Roméo, son rappeur de frère. « On se calme, ça va venir… Mais avant ça, on va parler d’un mec sans qui mon frère ne ferait pas du rap. » Re-bruissement de foule, ça s’excite. « Ça s’appelle Victime de la mode, c’est de Solaar. » Angèle entame sa reprise jouée pour Nova en novembre dernier, quand soudain… Maître Solaar débarque sur scène, accueilli par une pluie de smartphones captant l’instant. Si le morceau, dans l’excitation, est approximatif, l’instant, lui, est assez irréel.
Et puis Roméo. Décrite comme le croisement entre Rihanna et Lily Allen, il se pourrait bien qu’en fait, Angèle ne soit la sœur de personne. Elle embarque tout le monde sur La loi de Murphy puis, sans surprise, rameute le frérot Roméo sur J’ai vu, le feat extrait de « Morale 2 ». Carton plein, tout ça en moins de deux heures. À défaut d’un répertoire vraiment complet et totalement maitrisé, cette musicienne a déjà l’énergie, l’innocence et la jeunesse pour elle. « Mes chansons passeront jamais à la radio », chante-t-elle ce soir dans ce qui ressemble à un inédit. Ce sera sa seule erreur : Angèle est déjà partout. Et tout ça sans même avoir sorti d’album. Pour le coup, c’est tout sauf une blague belge.
Crédit photos : Goledzinowski