On a demandé à Loveni ce qu’était vraiment « une nuit avec un bon gamin »

Après Ichon et Myth Syzer, c’est au tour du troisième larron de Bon Gamin de se lancer en solo avec un premier projet « réalisé entre potes ». Ça parle de beuveries et de fêtes sans jamais penser au lendemain. Autant de thèmes sur lesquels nous sommes revenus aux côtés du rappeur parisien.

Ton projet solo devenait un peu une marotte ces derniers mois. Pourquoi as-tu mis plus de temps qu’Ichon et Myth Syzer pour publier ce disque ?

Sortir un long format, c’est différent de publier quelques bons morceaux ou couplets çà et là. Il faut avoir une vision globale, une certaine expérience, et je ne l’avais pas. J’ai bien failli sortir un projet il y a trois ans, mais je sentais que je n’étais pas prêt. Je suis un peu pointilleux, tu sais. Surtout, il fallait que je trouve mon son, mon identité. Ce qui a fini par arriver il y a deux ans.

C’est quoi, au fond, « Une nuit avec un bon gamin » ?

C’est une nuit où rien n’est prévu et où tu vas t’amuser. La nuit à Paris, je commence à bien la connaître. Donc il fallait tôt ou tard que ça ressorte dans mes morceaux. Et dans ma façon de les mettre en son. Pour l'album, j'écrivais toujours mes textes à l'instinct, en même temps que les différents producteurs composaient. En une nuit, on pouvait donc boucler deux ou trois textes.

Les filles, l’alcool, la fête, la nuit… Ces thèmes reviennent souvent dans tes morceaux. En quoi ils t’inspirent autant ?

Disons que je m’inspire de ce que je vis et que mes meilleurs potes sont quasiment tous des DJ, des patrons de bar ou des mecs qui aiment vivre la nuit. Pendant l’enregistrement de ce projet, je sortais donc pas mal. Il fallait que ça rejaillisse... Quant aux filles, j’ai l’impression que c’est une source d’inspiration pour énormément d’artistes, non ? D'ailleurs, la fille que j’évoque dans Stop encore, je l'ai vraiment rencontrée.

Parmi ces thèmes, il y en a un qui t'inspire plus qu’un autre ?

La nuit, je pense, dans le sens où ça englobe tout. Perso, c’est très rare que je bosse la journée. La nuit, j’ai l’impression qu’il y a une forme de liberté qui s’installe, quelque chose qui facilite l’imprévu. Et comme je m’ennuie vite en général, j’aime cette sensation où tout semble possible. C’est ce qui m’inspire le plus. Mais finalement tout dépend de l’ambiance et des musiques que vont m’envoyer Myth Sizer, Ikaz Boi et les autres producteurs.

Dans Le piège, tu dis que tu « penses moins à demain ». Un peu comme Ichon finalement. Qu’est-ce qui t’effraie tant dans l’avenir ?

J’ai 26 ans, je commence à être un homme, à avoir des responsabilités, à subir le stress… Donc je présume qu’il y a une recherche de liberté. On y revient, mais c’est l’un des grands thèmes de mon disque… On doit être la première génération à avoir grandi avec l’idée que l'on pouvait faire ce qu'on voulait. Sur le papier, c'est cool, mais sait-on vraiment ce qui est bon pour nous ? Ça donne un peu le vertige, on doit prendre de grandes décisions... Moi qui suis quelqu’un qui aime vivre le moment présent et ne pas penser à demain, ça effraie un peu.

« Une nuit avec un bon gamin » semble très inspiré par la scène californienne. C’est une scène que tu écoutes beaucoup ?

De ouf, oui ! Le G-Funk de Death Row ou de Tha Dogg Pound, ça ne vieillit pas ! Et puis des mecs comme Dom Kennedy, que j’ai beaucoup saigné pendant un temps, c’est quand même dingue au niveau du groove. Tout ça, c’est une source d’inspiration.

On dirait que Relance est inspiré par ce que pouvait faire les Neptunes au début des années 2000. C’est le cas ?

Je suis un gros fan des Neptunes, mais je n’avais jamais trouvé un titre capable de m’emmener sur ce terrain-là. Jusqu’au jour où PH Trigano, qui produit trois titres de l’album, m’envoie cette instru. C’est un vrai musicien, qui a une vraie oreille, qui sait jouer du clavier et qui m’a encouragé à tester ce refrain, qui n’est rien d’autre qu’un gros clin d’œil à Pharrell avec cette voix aiguë que j’ai tenté d’avoir. Le plus dingue, c’est que ça a tout de suite pris : quand on a réalisé le morceau, on était en studio, il était deux ou trois heures du matin et les gens dansaient en écoutant le refrain.

C’est marrant parce que Myth Syzer n’est pas très fan des Neptunes, non ?

C’est un grand débat entre nous. Mais c’est clair qu’en tant que producteur, ce n’est pas ce qui le fait bander. Moi, en revanche, j’ai tout écouté. N.E.R.D., par exemple, c’est la première fois que j’écoutais autre chose que du rap... Je trouve Pharrell hyper intéressant dans la production, dans sa méthode de composition et dans cette façon de s’inspirer du rock, avec ses ponts et ses refrains, pour construire ses morceaux. Ce n’est jamais simplement une boucle et un sample, c’est toujours plus complexe.

La carrière de Pharrell te fait envie ?

D’un point de vue personnel, je rêverais plus de la carrière de Tyler, The Creator. J’aime sa démarche, et j’ai l’impression qu’il a su tirer son épingle du jeu : il a sa marque, ses défilés, sa radio, son émission de télé et un univers bien à lui. Surtout, il a réussi à être super hype sans jamais vraiment faire le son du moment, et ça c’est très fort.

Syzer disait que l’album de Bon Gamin était prévu pour cette année. Ça se confirme ?

On a des musiques, mais il aurait sans doute fallu les sortir il y a un an et demi. Depuis, on s’est tous focalisés sur nos projets et il faudrait probablement tout reprendre à zéro. Est-ce qu’on aura le temps pour faire ça ? Je ne sais pas. Ce qui est sûr, c’est qu’on est toujours ensemble sur scène et que l’esprit Bon Gamin vit à travers nos projets respectifs. « Une nuit avec un bon gamin », par exemple, c’est mon projet solo, dans le sens où j’ai pensé au concept et où j’ai tout piloté, mais c’est un projet qui a avant tout été réalisé en groupe. On l’a écrit en famille, entre potes, toujours de façon très spontanée.

Loveni sera en concert au Badaboum le 15 mars prochain.