2019 M12 9
« Ce sont toujours les meilleurs qui partent en premier. » Ce proverbe semble parfaitement coller aux basques de la musique contemporaine. Pourquoi ? À cause de l’expression consacrée du « club des 27 », un terme d’abord apparu à la fin des années 1960 quand, coup sur coup et en l’espace de deux ans, quatre grandes figures de la révolution des baby boomers tombent : Brian Jones, Jimi Hendrix, Janis Joplin et Jim Morrison. En quelque sorte, c’est un peu comme si entre 2017 et 2019 Taylor Swift, Drake, Kanye West et Rihanna étaient décédés sans avoir la trentaine, pour remettre les choses dans le contexte. Il n’en faudra pas plus pour que s’ouvrent les portes de ce « club des 27 » où l’aura des artistes morts de tout sauf de vieillesse continue de briller même 50 ans après leur disparition.
Faisons maintenant la liste des titulaires de la carte du club des 27.
Robert Johnson (1911 – 1938) : il s’agit en quelque sorte du « patient 0 », le premier. Les faits sont d’autant plus troublants que sa mort reste, 81 ans après, toujours inexpliquée. Il aurait vendu son âme au diable, comme le rappelle la légende. La vérité est que le guitariste est mort d’une pneumonie.
Brian Jones (1942 – 1969) : Il n’avait pas de pull marine, mais il est mort noyé dans la piscine. Déjà en retrait du groupe qu’il avait pourtant fondé, le Rolling Stones finit sa course dans l’eau après avoir gobé un somnifère et décidé d’aller faite trempette en pleine nuit. Des rumeurs parlent d’un meurtre par le maçon de Brian Jones, pour un mystérieux motif.
Jimi Hendrix (1942 – 1970) : Comme Brian Jones, Hendrix avait quelques manies, dont celle de prendre des somnifères comme on goberait des bonbons. Le vendredi 18 septembre 1970, ce sera la fois de trop ; il meurt étouffé dans son vomi. Rappelons que sans cette passion dévorante, le plus grand guitariste du rock’n’roll serait encore là. Et qu’il aurait 77 ans.
Janis Joplin (1943 – 1970) : Au rayon des morts stupides, voici l’une des plus belles. Dans la nuit du 4 octobre 1970, l’auteur de Cry baby décide de s’injecter de l’héroïne dans sa chambre d’hotel puis, étant sortie pour acheter un paquet de clopes, rentre dans sa chambre où elle tente de poser le paquet sur la table de chevet… qu’elle percute avec sa tête.
Jim Morrison (1943 – 1971) : « Oh show me, the way, to the next whiskey bar… » Pour le leader des Doors, la folle course s’arrêtera à Paris dans la nuit du 3 juillet 1971 dans une salle de bain. Là encore, les circonstances sont troubles : certains parlent de problèmes d’insuffisance cardiaque, d’autres de suicide par overdose, d’autres enfin d’une mort maquillée par les dealers qui lui refilèrent de l’héroïne pure et tentèrent de le réanimer en présence d’un médecin dans un bain d’eau froide. L’enterrement aura finalement lieu au Père Lachaise en présence de cinq personnes, après que Big Jim a déclaré, à propos de la mort de Brian Jones, Hendrix et Joplin qu’il était le quatrième sur la liste. Tristement prophétique.
Kurt Cobain (1967 – 1994) : De la liste des 27, c’est le seul à s’être officiellement suicidé. Acculé, tourmenté, fragilisé par le succès, le leader de Nirvana s’enferme chez lui à Seattle et pousse la détente du fusil acheté par son ami Dylan Carlson, non sans avoir laissé derrière lui une lettre citant une chanson de Neil Youg (Hey Hey My My) : « Mieux vaut brûler franchement que de s’éteindre à petit feu. » Cette mort est à l’origine de la popularisation du « club des 27 ; un mythe toujours présent de nos jours et décuplé par la force des clichés couleurs de Cobain désormais affichés sur tous les T-Shirts.
Amy Winehouse (1983 - 2011) : Déjà plus très en forme avat de mourir, l’auteur de « Back to Black » finit ses jours dans son appartement londonien après une overdose d’alcool (son péché pas très mignon) due à une tentative de sevrage. La surdose de la nuit du 23 juillet 2011 sera fatale. Aux dernières nouvelles, papa Winehouse aurait vraiment prévu de réanimer sa fille via une tournée en hologramme.
D’autres artistes contemporains comme Tupac ou XXXTentacion, en dépit du fait qu’ils soient morts à 25 et 20 ans, auraient pu « mériter » d’entrer dans le club, et l’actualité quotidienne tend hélas à prouver que les jeunes rappeurs n’attendent même plus d’avoir 27 ans pour décoller vers l’au-delà. Pour Eric Segalstad et Josh Hunter, auteurs du livre The 27s: The Greatest Myth of Rock & Roll, les musiciens qui accèdent très tôt à la notoriété adoptent plus fréquemment des comportement à risque, avec les conséquences qu’on connaît. Derrière la romance de ce club, une seule certitude : mieux vaut donc obtenir son premier tube vers 30 ans qu’à la fin de l’adolescence.