Ma vie, ma ville : Montreuil vue par Prince Waly

De la pochette de son dernier projet, « BO Y Z », à ses textes, Prince Waly ne cesse de raconter sa ville. Jack a donc cherché à en savoir plus sur Montreuil aux côtés de celui que l'on surnomme le « Maire de la ville ».

Un témoin dans la ville. « À la base, je viens du haut-Montreuil, boulevard de la Boissière, juste en face de l’hôpital André Grégoire. Avec les potes, on faisait tout le temps du vélo, on participait aux fêtes de quartier sur la place de la Mairie, on allait à la Croix de Chavaux, l’endroit le plus touristique de Montreuil, ou on allait se taper un grec avec Fiasko, mon associé au sein de Big Budha Cheez. Il est juste à côté de la mairie de Montreuil, et c’est le plus incroyable que j’ai jamais mangé…

Avec la gentrification, l’ambiance a un peu changé ces dernières années. Dans un sens, c’est cool : ça a incité la ville à construire tout un tas de lofts, de bars et de petites salles de concert un peu hypes, ce qui permet à mes potes du quartier de s’ouvrir à d’autres cultures et de ne plus systématiquement trainer en bas de chez eux. Mais ça a aussi un effet néfaste, dans le sens où de plus en plus de Parisiens viennent s’installer ici, changent la mentalité et contribuent à l’augmentation des loyers et de la taxe d’habitation… Ça scinde la ville en deux…»

Vivier artistique. « Il y a toujours eu une grosse scène rap à Montreuil. Récemment, grâce à des artistes comme Triplego, Ichon ou Swift Guad, on a toutefois réussi à faire parler de nous à l’échelle nationale. Avec Fiasko, on a d’ailleurs très vite réussi à faire des open mics à Paris. On avait cette volonté et cette possibilité de viser plus haut. Notre premier véritable concert, cela dit, c'était au Café La Pêche, une sorte de café-restaurant avec un studio d’enregistrement et une scène au sous-sol. C’est un des lieux phares de Montreuil pour les musiques urbaines. Mais pas que : le café est installé juste en face du lycée Jean Jaurès et propose des repas peu chers le midi aux étudiants. C’est une plaque tournante.

 

« "Beaucoup d’’expressions tombées dans le registre populaire trouvent leurs origines ici-même : « narvalo », « michto », « nachave », ce sont des mots de chez nous, inventés par les gens du voyage, installés en nombre à Montreuil." »

Côté artistique, il y a aussi le studio L’Albatros où on a enregistré nos albums avec Big Budha Cheez. C’est un ancien studio de cinéma reconverti en atelier d’artistes. La compagnie Juste Debout a longtemps fait ses répétitions là-bas, tandis que d’autres louaient des locaux pour faire des bijoux ou du beatmaking. C’était un vivier artistique incroyable : Jazzy Bazz y passait souvent, j’y ai rencontré Myth Syzer et un des Mobb Deep était venu y enregistrer un morceau. »

Ville métissée. « Aujourd’hui encore, même si je vis entre Montreuil et Paris, 90% de mes inspirations viennent de cette ville, très métissée et éclectique. Il y a tellement de communautés que tout le monde peut s’y retrouver. Peu de gens le savent, mais beaucoup d’’expressions tombées dans le registre populaire trouvent leurs origines ici-même : « narvalo », « michto », « nachave », ce sont des mots de chez nous, inventés par les gens du voyage, installés en nombre à Montreuil.

Tout ça fait que c’était très important pour moi de réaliser la pochette de mon album à Montreuil. Avec Fifou, lui aussi originaire du coin, on a donc été shooter la cover au cœur de la cité de La Noue. Mon frère habite dans une des tours, c’est un endroit que je connais bien. Mais je t'avoue que c'était surtout pour le côté esthétique et l'aspect symbolique, histoire de dire que je serai toujours un gars de Montreuil. »