2018 M09 12
Des millions d'abonnés. Elles sont aussi pratiques qu’omniprésentes. Les playlists des plateformes de streaming représentent aujourd’hui une base d’auditeurs impressionnante : les cinq premières de Spotify cumulent plus de 56 millions d’abonnés. Une force de frappe qui joue en leur faveur et qui pousse les labels et les artistes à adapter leurs productions afin de gagner une place dans celles qui sont les plus plébiscitées. Quand on remarque que l’entrée d’un seul titre dans l’une d’entre elles peut changer la carrière d’un artiste, l’efficacité, en 2018, des journalistes musicaux, peut être effectivement remise en question.
Pouvoir. Le travail des personnes en charge de ces playlists se rapproche de celui des prescripteurs, c’est-à-dire de découvrir et cibler de nouveaux talents et d'essayer de mettre la main sur le prochain tube avant les autres. Par exemple, la playlist « RapCaviar » sur Spotify, qui compte plus de 10 millions d’abonnés, était réalisée jusqu’à récemment par un seul homme : Tuma Basa. Il avait donc le pouvoir, en incluant le titre d’un jeune rappeur en herbe dans sa sélection, d’aider considérablement sa carrière. Et ce, sans promotion préalable.
Célébrité éphémère ? Pour illustrer le pouvoir des playlists, deux universitaires ont analysé les chiffres d’écoutes d’une chanson (What If de Kane Brown) avant, pendant et après son entrée dans « Today’s Top Hits » de Spotify. Son nombre d’abonnés est passé de 11,6 à 29,2 millions en trois semaines. Idem pour le nombre d’écoutes, qui a instantanément augmenté de 100 000 streams quotidiens. Aucun média de musique, ni même les géants comme Pitchfork, n’ont cette capacité à autant influer sur la notoriété d’un artiste. Le hic ? Dès sa sortie de la sélection, la chute a été vertigineuse : son nombre d’abonnés est passé de 30,8 à 10,8 millions. L’ascension est fulgurante, mais ne durerait pas ?
Ça peut rapporter gros. L’appui des médias reste important dans la promotion d’un artiste. Mais la présence sur une playlist majeure est devenue l’enjeu principale des labels et maisons de disques. Les avantages sont nombreux : augmentation immédiate du nombre d’écoutes, gain d’argent et de visibilité et plus si affinités (comme des sorties de disques soutenues par une plateforme de streaming via une campagne d’affichage). Au sein des labels, on a même créé de nouveaux postes. Les « trade marketers » ou « key account managers » ont pour objectif de défendre auprès des plateformes de streaming les artistes pour les inclure dans certaines playlists.