2020 M03 6
Si l’information vous a échappé, c’est que vous êtes soit trop vieux, soit absent des réseaux sociaux : le nouvel album des Sud-Coréens de BTS, « Map Of The Soul: 7 » est sorti le 21 février dernier. Numéro 1 aux USA (un fait déjà particulièrement surprenant), il l’est également depuis quelques jours en France après que le groupe a rempli l’année dernière deux Stade de France, un autre exploit comme on en compte des dizaines pour ces outsiders devenus leaders. Des exemples ? Oui, un seul : BTS (pour Bangtan Sonyeondan, soit les « Boy Scouts pare-balles ») pèse en son pays 4,5 milliards d’euros, soit 0,3% du PNB de la Corée. Et cela n’est pas une surprise.
Comme le rappelait Le Monde en 2019, « la K-pop se distingue bien par son modèle industriel, standardisé et encouragé par le gouvernement sud-coréen, depuis la fin des années 1990, pour exporter ses productions culturelles en dehors des frontières du pays ». Le papier de rajouter que chaque membre du groupe (non, on ne dit pas boys band) a sélectionné selon des spécificités physiques et des traits de caractère (non, on ne dit pas stéréotype non plus), puis a été signé par un label au nom sans équivoque : Big Hit Entertainment. Depuis ? C’est une success story. Sûrement à cause de la musique (un peu) mais aussi des fans (beaucoup), soit une génération ayant grandi avec TikTok et le besoin de s’exprimer autrement qu’en écoutant simplement un disque sur son fauteuil. C’est d’ailleurs sur ce réseau social que BTS a récemment présenté 30 secondes du titre On, provoquant une avalanche de chorégraphies qui a, purement et simplement, fait sauter les serveurs de l’application.
Le phénomène, un temps pris de haut par les médias, n’a pas épargné la France. Sur Facebook, c’est le groupe privé BTS French Army qui, avec 36 000 fans, donne le La avec en moyenne 170 publications (!!!) par jour. Sur Twitter en revanche, la guerre est ouverte : des dizaines et des dizaines de comptes de fans pullulent et soutiennent activement (le mot est faible) chaque information autour du groupe, jusqu’à développer une animosité contre les médias officiels qui leur permet de réaffirmer leur identité, loin des goûts dictés par l’industrie.
Les BTS se sont classés numéro 1 dans les 5 pays qui concentrent le plus gros marché de la musique au monde. À savoir :
— ҚΞИ⁷ (@Kensugakura) March 2, 2020
- Les USA
- L'Allemagne
- Le Royaume-Unis
- La France
- Le Japon
Il serait donc temps pour nos chers médias d'arrêter de parler d'un simple "phénomène".
Les médias ont plus parlé de BTS pour leurs vacances et l'annulation de leurs concert que pour avoir remplis deux Stade de France, eu un disque d'or en France, et un #1 au SNEP.
— 𝑨𝒓𝒕𝒉𝒚⁷ (@yoonminuscule) March 1, 2020
C’est d’ailleurs l’un des aspects les plus intéressants du phénomène BTS : les fans français de K-Pop ont permis au genre – longtemps méprisé – de sortir du ghetto, puis de s’imposer en haut des charts alors que rien ne prédestinait BTS à cela. Les quelque 18 millions de vues pour le clip de Black Swan en seulement 24 heures en sont une preuve, le fait que « Map of the Soul: 7 » soit déjà l’album le plus commandé de tous les temps, une autre.
Est-ce une bonne nouvelle pour la musique ? Les plus vieux répondront qu’il ne s’agit que d’une version asiatique et très marketée de One Direction, les autres (et nous sommes de ceux-là) que c’est une excellente nouvelle pour l’industrie musicale, secouée de l’extérieur à la manière des gilets jaunes heurtant les politiques. Ce jeune public, in fine, souhaite manifester son envie de diversité, loin des standards que l’industrie occidentale tente depuis des années de lui imposer, de plus en plus difficilement. Le succès en France de BTS est à analyser selon cette grille de lecture. Visiblement, rien ne pourra plus les arrêter.