En France, la lente mort des boites de nuit

En 40 ans, ce sont 1563 établissements de nuit qui ont mis la boule à facettes au placard. En cause : les applications de rencontre, les arrêts préfectoraux et la crise, qui ont eu la peau des discothèques.

La fièvre du samedi soir est tombée. Souvent les seuls lieux à la ronde où l’on peut encore boire un whisky coca après minuit, et où le DJ ne rate jamais une occasion de passer les grands tubes du moment et d’antan, les discothèques n’arrivent plus, depuis quelques années, à suivre le rythme. Dans un article paru en août 2019 dans le journal l’Express, ce sont depuis le début de l'année entre 40 et 60 établissements qui ont coupé le son (sûrement plus puisque nous sommes désormais en novembre).

Sans surprise, ce sont ceux situés à la campagne qui en pâtissent le plus. La Clé des Champs dans l’Ain, le Palm’s à Quimperlé, l’Attitude Club à Corbiny ou encore le mythique Macumba de Saint-Julien-en-Genevois en Haute-Savoie (cinq salles) : tous ont été, dans les années 1980 et 1990, des hauts-lieux de la nuit en « province ». Et tous depuis ont fermé la porte, laissant derrière eux des bouteilles trop chères et des rencontres fortuites d’un soir et d’une vie. 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Discothèques, Pays de Gray - Atlas des Régions Naturelles, 2017

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Tinder a remplacé le Macumba. Il y a plusieurs raisons qui expliquent la lente descente aux enfers des discothèques. D'abord la migration des jeunes vers les villes où les bars et les restaurants sont devenus des alternatives bien plus réjouissantes qu’une soirée mousse au Paradise. Il y a aussi le fait qu’aujourd’hui, la musique rime avec festivals, concerts et Spotify plus qu’avec DJ Freddy sur le dancefloor qui s’enjaille sur Les Démons de Minuit. Lou, 24 ans, raconte pourquoi elle évite les discothèques : « En général la musique me plaît pas, j’ai trop chaud et j’ai l’impression d’être comme un morceau de viande. Je préfère largement les concerts ou boire un verre en terrasse. En boite, tout est trop codifié et ça me gonfle. »

Les habitudes des Français ont changé et aller en boite n’a plus autant d’intérêt qu’avant puisque pour faire des rencontres, il suffit d’avoir une connexion 4G et un téléphone. « Les boîtes de campagne sont victimes de la désertification. Il n’y a plus d’emplois, plus de commerces. Notre pire ennemi, c’est le téléphone portable. Il suffit de cliquer pour faire des rencontres sans payer les 10 euros d’entrée de boîte », balance Éric Brachet, l’ancien patron des Vieilles Forges à Combiers dans le Sud-Charente. 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

#helianthe #discotheque #afterparty #aveyron

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À bout de souffle. L’autre problème : c'est le transport. Bien souvent, les boites sont situées dans des zones loin de tout pour éviter les plaintes des voisins ennuyés par le bruit (la musique comme les fêtards éméchés à 5 heures du mat’). L’accentuation des contrôles de police pour faire souffler les conducteurs a peut-être dissuadé certaines personnes à opter pour l’option Macumba. « Ils font souffler, souffler et souffler les gamins au point de les dégoûter », raconte l’ex-patron de La Grange aux Loups en Corrèze, Jacques Claret, à l’Express.

Fatalement, les chiffres d’affaires des boites de nuits chutent et les finances ne permettent plus de continuer à faire vivre ces lieux. À bout de souffle, les fermetures s’enchaînent. Mais il reste tout de même les clichés des photographes François Prost et Éric Tabuchi, qui ont immortalisé les façades de ces établissements. Ça laisse un petit goût amer de Get 27 dans la bouche, cette histoire.