2018 M11 2
Nuits chaudes. Admettons le de suite, nous étions complétement passé à côté de « Los Angeles », le premier album de Rosalía, pourtant nommé cinq fois en 2017 aux Latin Grammy Awards. Plébiscité par Pedro Almodóvar, le réalisateur espagnol lui a offert un rôle dans son prochain film, Dolor y gloria, aux côtés de Penélope Cruz, il y avait pourtant de quoi mettre Rosalia dans la liste des personnes à suivre de près.
Lorsqu'on découvre cette jeune Barcelonaise de 26 ans en mai dernier avec le clip de Malamente, la claque se veut donc encore plus violente : on l'aperçoit en costume traditionnel avec sa capirote (chapeau typique des nazarenos, pénitents de la Semaine Sainte à Séville) en train de skater, de se jouer des codes de la corrida et d’entamer une chorégraphie à mi-chemin entre le flamenco et les pas de danse des girs bands des années 1990.
Étreintes brisées. Malamente est justement le titre qui ouvre son deuxième album, « El mal querer » (« La mauvaise façon d’aimer » en VF), une référence à la thèse qu’elle menait à l'École supérieure de musique de Catalogne. L'album est découpé en chapitres et inspiré par Flamenca, un roman d'amour du XIIIème siècle. On découvre ainsi onze morceaux presque intimidants dans leur ambition et leur démesure. Comme lorsque Rosalía se lance dans une reprise en espagnol de Cry Me A River de Justin Timberlake (Bagdad) ou dans des refrains qui transpirent l'été et les nuits sans fin sur la plage (Pienso en tu mirá).
Happy. Ce sens de la mélodie, Rosalía le doit probablement à son héritage familial, à des parents qui l'ont abreuvé au pop-rock anglo-saxon (Queen, Bob Dylan, Supertramp) et la laissent se plonger dans le répertoire des grandes voix du flamenco (Carmen Linares, Enrique Morente ou La Niña de los Peines). En résulte un disque hybride, qui doit autant aux musiques traditionnelles espagnoles et au R'n'B de Rihanna qu'à la trap ou à la pop music d'artistes perpétuellement en quête de tubes universels. Pas un hasard, donc, si Pharrell Williams l’a d’ores et déjà invitée dans son studio à L.A.
Crédits photo : Emilia Gutiérrez