L'histoire un peu droguée derrière la pochette du "Rubber Soul" des Beatles

En pleine consommation abondante de drogue douce et réinvention sonore, les Beatles sortent “Rubber Soul” dans un contexte bien particulier. En 1965, le psychédélique entre enfin dans la musique des Fab Four, mais également dans leur esthétique, à commencer par la cover du disque.
  • Si la pochette de “Rubber Soul” paraît légèrement étirée, c’est tout bonnement parce que... c’est le cas. On la doit au photographe Robert Freeman, collaborateur de longue date des Beatles. Il était déjà l’homme derrière les artworks des quatre précédents albums du groupe, mais pour celui-ci, il va radicalement changer de style visuel et ce, complètement par hasard.

    A l’époque, John Lennon habite dans la banlieue très éloignée de Londres. C’est dans sa maison qu’il retrouve ses trois comparses pour le shooting de “Rubber Soul”. Le groupe a enregistré l’album en seulement un mois et il cherche à le sortir le plus vite possible. A l’origine, l’idée des Beatles est de simplement faire un joli portrait, immortalisé par l’indéboulonnable Robert Freeman. Quelques jours plus tard, dans la capitale britannique, les musiciens retrouvent le photographe pour avoir un premier aperçu de ses images. Paul McCartney décrit la scène : “Freeman projetait les photos sur un morceau de carton de la taille d'une pochette d'album pour qu'on se rende compte ce que ça pourrait donner. On venait de choisir la photo quand le carton a légèrement glissé vers l'arrière, étirant la photo.

    Une fois l’image allongée, les Beatles l’adoptent dans la seconde. Selon leur photographe, “l’effet déformé de la photo était le reflet de l’évolution de leur vie.” En 1965, la vie des Fab Four est essentiellement marquée par leur usage journalier de cannabis. Le fond de l’image et les petits yeux de John Lennon ne laissent pas de doute quant à la consommation de weed du groupe. George Harrison ira même jusqu’à révéler qu’il s’agit du “premier album où nous étions des drogués à part entière.” 

    Autre fait marquant sur cette pochette délirante : le lettrage de l’album. Robert Freeman est allé chercher un autre Londonien du nom de Charles Front pour s’occuper de l’inscription. L’illustrateur s’est inspiré du titre du disque “Rubber Soul” ainsi que des feuilles d’un arbre à caoutchouc (“rubber tree” en anglais) pour élaborer un lettrage si unique qu'il servira de mètre étalon pour les dessins psychédéliques des années 1960. Pour certains fans, rien n’est laissé au hasard et si l’on regarde ce titre dans un miroir, on peut lire “Abbey Road”. Verra qui pourra.

    L'angle atypique de la pochette du disque ainsi que l’absence du nom du groupe (à la demande des Beatles) a quelque peu inquiété Capitol, leur maison de disques. Le label voulait utiliser la photo originale pour la sortie de “Rubber Soul” aux Etats-Unis, mais le groupe a posé son veto afin de garder son idée singulière. Plus tard, les Beatles abandonneront légèrement la fumette pour l’acide. Et cela donnera une autre pochette, là encore, loin du portrait famille ringard des années 60.