À Marseille, le rap vit un nouvel âge d’or

Pas vraiment hantée par l’ombre des anciens (IAM, FF, Psy4), une nouvelle génération de MC marseillais est en train de prendre le pouvoir. Avec des refrains bourrés d’Auto-tune, des prods qui doivent parfois plus à la variété qu’au hip-hop et une indépendance revendiquée. Gloire à l’art de rue.
  • À la bonne école. S’il fallait résumer en une phrase l’importance de « L’école du micro d’argent », on pourrait dire que le troisième album d’IAM est au rap marseillais ce que La nuit des mors-vivants est au film de zombies : la Sainte Bible. En clair, c'est le disque qui a définitivement installé Marseille sur la carte du hip-hop hexagonal, et permis à Akhenaton d’acquérir la stature nécessaire pour chapeauter différents projets (la B.O. de Taxi, celle de Comme un aimant) et prendre sous son aile ce qui constituera la grande époque du rap marseillais (3ème Œil, Fonky Family, Psy4 de la Rime, etc.

    Niquer le passé. Ceux qui ont aimé cette période – et on sait qu’ils sont nombreux – ne peuvent que se réjouir de la forme affichée ces dernières années par les artistes de la Canebière, très importants pour une génération d’auditeurs, toujours plus nombreux et religieusement acquis à leur cause. L’engouement autour de Jul est un bon exemple. Si celui que l’on surnomme « l’OVNI » ravive les souvenirs des gloires passées, il s’interdit par contre la nostalgie. Lui se fiche de la technique, du boom-bap, de la belle phrase et compose un univers musical souvent cheap, parfois gênant, mais toujours singulier et nourri aussi bien au raï qu'au R'n'B.

    Une fine équipe. Autour de Jul, et non derrière lui, ils sont nombreux à prendre la même liberté et à connaître un succès, certes moindre, mais tout aussi impressionnant : « Confidences », le premier long format d'YL, s'est écoulé à 14 500 exemplaires en première semaine, Naps vient de publier son deuxième album en un an, « 100% », le dernier album d'Alonzo, a été certifié disque de platine en 2017, Soprano est devenu la célébrité préférée des enfants de 7 à 17 ans selon le Journal de Mickey (et se permet donc des duos consternants avec Patrick Fiori et d'autres stars de la variétoche) et les différents clips de SCH accumulent plus de 444 millions de vues sur YouTube.

    En direct des quartiers nord. La plupart du temps, ces artistes trempent allégrement leurs mélodies dans l’Auto-tune et semblent particulièrement fiers de leur identité marseillaise, qu’ils revendiquent en employant l’argot local, en s’affichant avec le maillot de l’OM ou en collaborant avec des producteurs bien connus des environs. À l’image de Ladjoint qui, depuis le studio B.Vice, a peaufiné les morceaux de Jul, Kery James, Sofiane ou Lacrim. Parmi les nouveaux arrivants, il y a également Zamdane, récemment signé sur Z Records (sous division rap du label Pain Surprises), auteur du captivant Disaster et incarnation de cette liberté de ton et de cette diversité propres à la planète Mars.