"Ventura", l’album d'Anderson .Paak dont le monde avait besoin

Grand disque bourré d'idées mélodiques, « Ventura » est aussi un album secoué par les questions intimes, celles d’un Anderson .Paak qui interroge ici sa célébrité et le racisme en Amérique. Le disque vient de sortir, on vous explique pourquoi il est important.

La revanche. Productif, Anderson .Paak n’en reste pas moins un homme discret. Du moins en France où les médias courent après lui (en vain, bien sûr) pour les besoins d'une interview. Là où tant d’autres artistes conservent pour leur seul personnage public un catalogue d’excentricité et d’énergie, offrant une musique finalement plus fade que l'image qu'elle renvoie, l’Américain a opté pour l’attitude inverse. Toute sa folie, toute son ingéniosité, est réservée à ses seuls enregistrements, qu’il enchaine ces derniers temps.

En toute simplicité. Trois mois après « Oxnard », Anderson .Paak est en effet de retour avec un nouvel album, « Ventura ». Une réponse à peine masquée aux critiques adressées à son prédécesseur ? À l'évidence, oui, tant le Californien revient ici à un son plus simple, moins grandiloquent, quelque chose qui le rapproche parfois plus volontiers de la Philly soul des années 1970 que des grandes envolées orchestrales d’« Oxnard » ; même si les chœurs, les arrangements de cordes et les pédales wah-wah viennent dynamiser la plupart des morceaux.

Surtout, Anderson .Paak se repose moins sur les invités qui, hormis le trop rare André 3000, se fondent dans le décor, sans jamais la ramener. Pour preuve, même la légende Smokey Robinson se contente d’assurer les backs sur Make It Better, tandis que le regretté Nate Dogg ne se manifeste qu'à travers quelques murmures en conclusion de l'ultime What Can We Do ?.

Rappeur-crooner. En 39 minutes, Anderson .Paak réussit donc quelque chose de grand, assez référencé (le scat en conclusion de Reachin’ 2 Much), mais en évitant les codes éculés de ses héros (Prince et Quincy Jones, notamment). « Ventura », ce sont onze chansons qui résonnent avec l'actualité (la discrimination raciale sur King James), qui se moquent ouvertement de Trump (Chosen One) et qui souhaitent faire tourner sur les ondes une certaine idée de l'amour. Elles sont l'œuvre d'un crooner, en somme, mais qui ne se perd jamais dans des mots doux ou de vaines vocalises.